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Confinement et activité physique & sportive : 3 questions au Professeur Jean-François Toussaint
L’activité physique et sportive est au cœur des actions de l’association Assurance Prévention depuis 2012, en partenariat avec l’IRMES (Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport). Mené pendant 5 ans, un baromètre** a permis d’évaluer le niveau d'activité physique des Français, ainsi que leur degré de connaissance des méfaits pour la santé de la sédentarité. Celui-ci révèle que 48 % des Français pratiquent une Activité Physique ou Sportive, ainsi que 69 % des enfants de 6 à 17 ans.
En cette période de confinement, l'activité physique et sportive étant en forte diminution, il est essentiel de conserver les bons gestes pour rester en forme. L’association Assurance Prévention a donc demandé au Professeur Jean-François Toussaint*, épidémiologiste et directeur de l’IRMES, de partager ses recommandations pour permettre à chacun, adulte et enfant, de lutter au mieux contre la sédentarité.
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Pourquoi est-ce important, dans ce contexte douloureux et inédit, de lutter malgré tout contre la sédentarité et de conserver une activité physique minimale ?
Professeur Jean-François Toussaint : En cette période de confinement inédite, qui dure depuis maintenant plus de 3 semaines, la pratique d’une activité physique ou sportive (APS) régulière est essentielle et va apporter de nombreux bénéfices. En effet, être confiné chez soi induit de de passer de longues heures en position assise ou allongée : pour télétravailler, lire, consulter ses écrans… Ce "temps sédentaire" - qui inclut des périodes passées en position assise ou allongée en dehors du temps de sommeil - peut être un facteur de maladies chroniques.
Bien-être moral et psychique. Après une activité physique, une sensation de bien-être se fait ressentir. Elle est due à une sécrétion d’endorphines, entraînant avec elles une sensation d’euphorie. L'activité physique active la production de neurotransmetteurs comme la noradrénaline, la dopamine et la sérotonine, jouant également sur l'humeur et l’estime de soi. C’est donc la libération de toutes ces substances combinées qui nous procurent cette sensation de bien-être. De plus, ces mécanismes vont permettre la réduction de l’anxiété et de certains états dépressifs pouvant émaner de l’isolement auxquels font face de nombreux Français depuis quelques semaines. Enfin, grâce à cette dépense énergétique, la qualité du sommeil est améliorée.
Système immunitaire. L’activité physique influence les paramètres immunitaires pendant et après la pratique et l’augmentation du niveau d’activité physique protège contre le déclin des fonctions immunitaires chez les sujets âgés. Les personnes pratiquant de manière régulière une APS témoignent d’une meilleure condition physique et récupèrent plus rapidement en cas d’infection. C’est actuellement la seule arme individuelle pour lutter contre le virus et son apport est loin d’être négligeable.
Dépense énergétique. La pratique régulière et pérenne de l’activité physique s’accompagne d’une augmentation de la dépense énergétique quotidienne. En cette période de confinement, il est probable que les apports augmentent. La pratique entretient la masse musculaire et régule mieux les variations du poids. L’ensemble des bienfaits de l’APS ont aussi pour effet de réduire le risque de diabète et de maladie cardio-vasculaire, en améliorant l’équilibre glycémique et la régulation de la cholestérolémie en faveur du "bon cholestérol".
Bénéfices pour l’appareil locomoteur. Bouger, même chez soi, permet d’entretenir l’équilibre, la souplesse articulaire, de prévenir l’ostéoporose, l’arthrose en renforçant le cartilage.
Il est essentiel de rester à l’écoute de son corps et de veiller à ce que l’intensité et le temps d'activité physique soient adaptés à la condition du moment… L’essentiel est de rester en mouvement et de réduire au minimum l’inactivité physique et la sédentarité !
Concrètement, quels exercices peut-on faire à la maison ? Y a-t-il des activités à partager avec ses enfants même dans un espace réduit ? Quid des seniors, population très exposée aux risques de Covid-19 ?
Professeur Jean-François Toussaint : L’Organisation Mondiale de la Santé recommande la pratique d’une activité physique d’une durée minimum de 30 minutes par jour, 5 fois par semaine. Ce temps d’activité est supérieur pour les enfants et adolescents qui ont besoin de se dépenser 60 minutes par jour.
En télétravail ou peu sportif de nature. Il est facile d’adopter quelques principes pour rompre le temps de sédentarité (assis ou allongé) si vous êtes en télétravail ou récalcitrant au sport : se lever toutes les heures ou deux heures et marcher entre 5 et 10 minutes ou bien garder la position debout le plus longtemps possible si l’espace est restreint (en travaillant sur une table haute par exemple). Si vous avez un jardin, n’hésitez pas à y passer le plus de temps possible et à l’entretenir. On y réentend les bruits de la nature et le chant des oiseaux.
Des outils à disposition. Si vous souhaitez être encadré et accompagné dans votre activité physique, un partenariat entre le ministère des Sports et certaines applications peut vous prendre désormais par la main et propose gratuitement des séances d’entraînement variées, créées par des professionnels du sport. Nombre d’autres applications d’accompagnement à la pratique ont également ouvert l’accès à leur contenu. Par ailleurs sur les réseaux sociaux de nombreuses vidéos proposent des séances gratuites adaptées à tous et aux conditions actuelles.
Exemples d’exercices. Si vous n’êtes pas trop "activité à distance", vous pouvez faire quelques exercices sollicitant l’appareil cardio-vasculaire comme la montée d’escaliers, des flexions ou bien un peu de corde à sauter (à raison par exemple d’une de plus par nouveau jour de confinement : lundi : 5 flexions de jambes, 5 pompes, 5 abdos ; mardi : 6 de chaque ; etc…).
Il est également possible d’utiliser votre mobilier pour faire des exercices d’étirement, de souplesse ou avec votre poids du corps. Vous pouvez également utiliser des objets du quotidien comme haltère (bouteille d’eau). Si vous avez des enfants, n’hésitez pas à partager leurs activités et les vôtres. C’est beaucoup plus drôle. Danser avec ou sans jeux vidéo, faire des courses de brouettes, des sauts de grenouilles, de la corde à sauter, réaliser des parcours à cloche-pied sont autant d’activités physiques ludiques qui permettent de se dépenser !
Il est toujours important d’adapter son activité à sa condition physique du moment, par exemple, au début, se lever d’une chaise et s’y réassoir à plusieurs reprises plutôt que de faire des flexions complètes. Les exercices d’équilibre et de gainage sont également facilement ajustables à votre condition physique.
Bouger chez soi en période de confinement : nos outils et contenus
Et lorsque la période de confinement aura pris fin, comment reprendre une APS ? Quelles précautions prendre ? Et si on a été touché par le Covid-19 y a-t-il des indications particulières ?
Professeur Jean-François Toussaint : Le maître-mot reste le plaisir ! Sélectionnez des activités qui vous plaisent. Après la période de confinement, si vous souhaitez reprendre une APS après une longue période d’inactivité ou bien si vous commencez une activité physique, il est préférable de réaliser un bilan médical.Pour débuter, il faudra vous équiper et adapter votre activité selon vos capacités physiques. Certaines activités comme la marche ou la course nécessitent seulement d’avoir des chaussures adéquates. De nombreuses offres existent, variées et adaptées à tous les publics. Si de bonnes habitudes ont été prises ou maintenues pendant le confinement, le plus important est de les conserver sur le long terme. En ritualisant par exemple le réveil musculaire en famille ou les étirements dynamiques de fin de journée. Cela peut être une bonne façon d’inscrire l’activité physique dans votre quotidien et de l’apprécier plus encore lorsque celle-ci sera possible sans restrictions à l’extérieur.
Enfin, si vous avez présenté des symptômes de Covid-19 ou avez été diagnostiqué porteur du coronavirus, l’essentiel est de rebâtir sa condition physique qui peut avoir souffert (même certains sportifs de haut niveau ont été touchés ; eux aussi s’y remettent progressivement dans le cadre de leur préparation liée à la reprise de la compétition). La reprise de l’activité doit être progressive et il faut être à l’écoute de son corps. En particulier si l’on a connu des complications, laisser le temps à son organisme de retrouver sa liberté de mouvement et de se réadapter à l’effort. Certains services hospitaliers vont sans doute proposer des possibilités de réhabilitation par le sport au cours de cette période.
* Jean-François Toussaint est professeur de Physiologie à l’Université Paris Descartes et directeur de l’Institut de Recherche Biomédicale et d’Epidémiologie du Sport (IRMES). Il est président du Groupe Expert « Sport, Santé et Participation » de la Commission Européenne.
** Enquête réalisée par OpinionWay et l’IRMES en 2016 pour Assurance Prévention, auprès d’un échantillon principal représentatif de 1 048 personnes âgées de 18 à 64 ans et d’un sur-échantillon complémentaire de 300 parents d’enfants 6-17 ans, ayant répondu à un questionnaire déclaratif on line, et mesuré le nombre de pas effectués sur 7 jours à l’aide d’un podomètre. Editions précédentes du baromètre Assurance Prévention réalisées de 2012 à 2015.
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